BASTIDES LANDAISES.


Les bastides furent fondées vers le XIIIe siècle, entre 1268 et 1346, pour regrouper et urbaniser les populations rurales assez dispersées à la suite des guerres incessantes, afin d'assurer la tranquillité du pays, le commerce ... et la collecte des impôts, mais aussi à des fins politiques dans  le contexte des querelles dynastiques nées de la présence anglaise en Aquitaine. Les pays landais étaient passés sous la suzeraineté des rois d'Angleterre, ducs d'Aquitaine, les rivalités franco-anglaises furent marquées par la création d'une ceinture de bastides autour des possessions respectives.

Ce sont donc des villes neuves( Bastida seu, villa nova), construites sur un plan relativement uniforme ( plan orthonormé, en arête de poisson, quadrillage, ilots, angles droits, place centrale, parcelles en lanière ...), après un contrat d association (paréage) entre les propriétaires du terrain et les représentants de l'autorité souveraine, et donnent lieu à l'octroi de chartes et à l'attribution de privilèges et de coutumes.

La défense était assurée par une enceinte concentrique composée de levées de terres et palissades, et, dans le meilleur des cas, par des murailles de pierre avec portes (Hastingues, Hontanx), tours, fossés et chemin de ronde.

Mention particulière pour les places du marché entourées des maisons à couverts ou "cornières'.


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LABASTIDE D'ARMAGNAC







plan simplifié des abords de la place royale



Labastide d'Armagnac

Fondée à la fin du XIIIe siècle (vers 1291) par le Comte Bernard VI d'Armagnac.La charte est ratifiée par Edouard Ier en 1294. Elle a conservé son plan d’origine , notamment sa Place Royale.



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SAINT-JUSTIN


Saint-Justin

Fondée sur une butte rocheuse dominant la Douze, en 1280, par un acte de paréage entre la Vicomtesse Constance de Marsan, fille de Gaston VII vicomte de Béarn, et Jean de Caubin, prieur de Saint-Gilles au nom du commandeur des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem possesseurs des terres.
Assiégée par les Anglais en 1359, pillée par les protestants en 1569, durement éprouvée durant la Fronde, elle fut déclarée détruite en 1654.


Saint-Justin



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GEAUNE EN TURSAN


Geaune

Fondée en 1318, au nom d'Edouard II, par le Sénéchal de Gascogne Antoine de Pessaigne de Génoa, marchand génois nommé l'année précédente. Paréage avec Pierre II de Castelnau-Tursan.
Prise par les Français et les Béarnais en 1337, elle subira les vicissitudes de la guerre de 100 ans.

Geaune a perdu ses remparts, mais elle conserve sa place à arcades, l’église du XVème siècle et la Tour des Augustins.


Geaune


Aspect de Geaune, d'après le cadastre du XIXe siècle



en voir plus
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GRENADE SUR ADOUR


Grenade

Fondée en 1289 par Jeanne d'Artois, vicomtesse de Foix et de Marsan, et son sénéchal Fortan de Lescun, avec le paréage du commandeur de l' hôpital de Saint Antoine de Goloni ( Bats)



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CAZERES SUR ADOUR


Cazères

Fondée en 1315 par Marguerite de Béarn, comtesse de Foix, vicomtesse de Marsan, par paréage avec le prieur de Saint Jean de la Castelle au nom de l'abbé de la Caze Dieu.

la place carrée de Cazères ...dans les années 50-60
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HASTINGUES


Hastingues

Fondée en 1289 par Edouard Ier  et le paréage de l' abbé d' Arthous, puis construite par le sénéchal Jean de Hastings., elle est située sur l'emplacement d'un ancien oppidum romain dominant les Gaves réunis.







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MONFORT EN CHALOSSE


Monfort
Fondée en 1320 (?)

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BONNEGARDE
BASTIDE FRANCAISE


Bonnegarde

Fondée en 1283 par Le roi-duc Edouard 1er d'Angleterre qui y séjourna  entre 1288 et 1289 .  

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Leur organisation est très régulière, avec une place centrale carrée, entourée de maisons à galeries couvertes ( cornières). De la place, partent quatre rues rectilignes barrées par une porte. Les rues secondaires, parallèles se coupent à angle droit, délimitant des îlots réguliers à l'intérieur desquels les parcelles sont distribuées. L' église est souvent excentrée ou adossée a la muraille extérieure pour participer à la défense. Autour de l'enceinte sont les padouins, biens communaux.


LES AUTRES BASTIDES ANGLAISES DES LANDES


Pimbo, établie sur une crête étroite dominant le Gabas 

Modestes et plus ou moins abouties ou conservées, elles sont principalement dues aux Sénéchaux de Gascogne au nom des rois d'Angleterre , ducs d'Aquitaine.

On remarque sur la carte des implantations que les bastides ont aussi une dimension militaire le long de la frontière entre le royaume de France ou ses alliés, et Plantagenets anglais. De même, suite à la guerre séculaire entre Béarn et Armagnac pour la possession des vicomtes de Marsan et Gabardan les bastides surgissent en grand nombre dans cette région, formant ainsi une ligne continue de postes militaires.

Certaines ne furent cependant pas crées ex-nihilo mais établies sur le site d'anciens bourgs abbatiaux (Sorde, Pimbo ..   ) ou de "castelnaux" préexistants (Arouille, Hontanx,Miramont-Sensacq ....)

On a pu recenser de 35 à 40 fondations de ces bastides. Mais la plupart , non abouties, n'ont laissé que peu ou pas de traces aujourd'hui,  (Montégut, Rondebeuf, Souprosse, Baigts, Bonnegarde, Coudures, Labastide-Chalosse, Nerbis, Cazordite, Castetcrabe, etc ...)


Sous HENRI III Plantagenet, duc d'Aquitaine de 1216 à 1272

1268 - Pimbo - C'est la plus ancienne bastide anglaise des Landes, destinée à se prémunir des entreprises de
Gaston VII vicomte de Béarn. Paréage entre le Prince Edouard et l'abbé de Pimbo
1270 -Villeneuve de Marsan - Fondée par le vicomte de Béarn
1274 - Miramont Sensacq

Sous EDOUARD Ier Plantagenet, duc d'Aquitaine de 1272 à 1307

1289 - Arouille - au lieu-dit Bialé- (commune de St Justin) - par Arnaud-Guillaume de Mauvezin,vicomte de Juliac, en réaction à la fondation de la bastide de Saint Justin.
1289 - St Gein - Paréage avec les seigneurs de Castendet- après une interruption de construction commencée
en 1284 et interrompue en 1285 suite réclamation de Constance de Marsan.


Sous EDOUARD II Plantagenet, duc d'Aquitaine de 1307 à 1325

1305 - Coudures -par le Sire de Lescun sur les terres d' Edouard II, sans son autorisation
1314 - Souprosse
1315 - Rondeboeuf (commune de Castendet)
1318 - Sarron
1319 - Villenave
1320 - Betbezer d'Armagnac- avec le paréage du vicomte de Juliac, Guillaume de Mauvezin,
1320 - Montegut - par Guilhem de Montaigut senechal -(modeste)
1321 - Toulouzette- par Guilhem de Toulouse, sénéchal
1327- Labastide-Chalosse - anciennement Labastide de Pont la Reine - détruite durant les guerres de religion, elle   n 'est plus décelable

Sous EDOUARD III Plantagenet, duc d' Aquitaine de 1325 à 1362

1331 - Port de Lanne
1331 - Hontanx
1331 - Duhort Bachen -avec le paréage de l' abbé de Saint Jean de la Castell
e.

traces, au début du XIXe siècle, du plan de la petite bastide de Duhort


D'AUTRES ...POUR MEMOIRE

Arthez-d'Armagnac (fondée en 1319) - Baigts (fondée en 1315 par Amaury de Créon, sénéchal de Gascogne) - Buanes (fondée en 1346 par Raymond de Castelnau-Tursan) - Castet-Crabe (commune de Bougue - fondée en 1275), - Fonfrède - Saint Maurice - Saint Pé - disparues.



traces, au début du XIXe siècle, du plan de la petite bastide de Buanes


Montaut

... et une miniature à Poullon


Dans le but de renforcer la défense de son domaine gascon, Henri III d'Angleterre envisagea de fortifier et peupler cet emplacement situé sur un promontoire naturel aménagé dès 1254. Il encouragea la clôture du château par une palissade de bois, et l'entretien des fossés, avant de tenter le peuplement du site que son fils Edouard 1er inspecta en 1287. Mais leur dessein ne semble pas avoir eu le succès espéré.

 Aux débuts de l’année 1450 Gaston IV, comte de Foix reprit par ruse ce castrum, réparé et fortifié, aux bandes de gens de guerre réunies là par le tenace Augerot de Saint Pé, capitaine gascon du parti anglais. (*)

 On y a bien trouvé des fossés et trous de poteaux et des rares vestiges des XIV et XVe mais il semble que son peuplement médiéval se soit plutôt développé autour de la terrasse qui aurait alors constitué une lice libre d'habitat. Il ne reste aujourd'hui que ce petit hameau qui a gardé son nom de "château" ou plutôt "Casteigt" de Pouillon, issu de l'ancien "castrum polionis", qui se trouve à moins d'un kilomètre à l'est du village. De forme quadrangulaire (125 m x 100 m), il domine de 40 m son pourtour, entouré de fossés de 6 m de large et 10 m de profondeur.

 (*) Voir le récit détaillé dans la chronique de Guillaume Le Seur sur l'Histoire de Gaston, comte de Foix, publiée par Henri Courteault pour la Société de l'histoire de France -Paris 1893- pages 96 et ss

Aussi, après avoir pris les places fortes de Hastingues et Peyrehorade, le comte de Foix accompagné de son frère de Lautrec, de Bernard de Béarn, du vicomte d'Orthe, et plusieurs autres barons, chevaliers, écuyers, 300 hommes d'armes, arbalétriers, gens de pied, et 7 grosses couleuvrines, entreprit une course vers le nord pour détruire ces bandes récalcitrantes en Chalosse.

Parvenue sur place, cette troupe s'embusqua dans un bois et envoya une douzaine d'hommes juste devant la porte de la place en faisant mine de vouloir voler le bétail qui paissait en une petite prairie. Les pâtres étant allés chercher de l'aide dans la place, une centaine d'habitants sortirent donc pour chasser les voleurs, mais furent attirés vers le bois où ils furent massacrés dans une embuscade menée par les hommes du comte de Foix et de Lautrec. Pendant ce temps, Bernard de Béarn et une cinquantaine d'hommes d'armes placés au plus haut du bois en profita pour gagner la basse-cour et le pont levis" et y eut là de belles et grandes armes faites, car nos gens et ceulx de la place combatoint main à main, et y estoit venu le cappitaine, lequel, avecque ses gens, se deffendoint bien vaillament"

Le comte de Foix et Lautrec accoururent à la porte renforcer l'assaut " et tellement chargèrent sur eux à pointes de lance et grands coups de hache que ils reboutèrent les Angloys et leur firent guerpir et habandonnet tout le pont. Et ainsy que les Angloys se cuidoint retraire en leur place, nos gens leur furent si près à leurs éspaulles que ils entrerent pasle mesle avecque eux, et par ce pont fut la place prinse de bel assault, et furent illec presque tous mors et prins ceux de laditte place"

La place de Pouillon fut alors pillée (y compris or argent et bijoux qui y avaient été mis en sureté) puis incendiée et détruite. Pourtant le capitaine Augerot de Saint Pé réussit à s'enfuir discrètement par les bois pour rejoindre Bayonne.

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A LIRE


A. Curie-Seimbres - Essai sur les villes fondées dans le Sud-Ouest de la France aux XIIIe et XIVe siecles, sous le nom générique de bastides - Toulouse 1880
J.-J. -C. Tauzin  - Les bastides landaises et leur organisation municipale du XIIIe au XVIIIe s ( Revue des questions historiques  Nouvelle Serie T XXV -1901 p 456 -517)
Serge Pacaud - Les Bastides du département des Landes - Éditions des régionalismes-2012.
J-M Lalanne   -Notes sur la topographie des bastides landaises (Bulletin de la Société de Borda 1973; 2, p. 153-173 ; 3, p. 259-278)
Ch. Higounet  - La Guerre de Gascogne et les bastides-frontières landaises  (Bulletin  Société de Borda , 1976 p. 413-417. )

A VOIR

(vidéo de la conférence de Jeanne-Marie Fritz et Claire Cazarrès
sur le site des Archives départementales des Landes)


Grenade (source aquarelle du CAUE des Landes)